Tôt dimanche matin, les sapeurs-pompiers des Bouches-du-Rhône ont fait appel à des colonnes de renfort (60 sapeurs-pompiers). Une colonne feux de forêt pour la Drôme a été engagée et le premier groupe (20 sapeurs-pompiers) a été déclenché vers 6 heures (celui du capitaine Rouillon). Photo DL
« Neuf fois sur dix, c’est le pompier qui gagne. À Orgon, nous avons perdu. C’est là que tu te dis que la nature est plus forte que toi. Elle a gagné cette bataille. Mais nos autres collègues ont gagné, au fil du combat dans les barres rocheuses, la guerre. » Quelques heures après son retour des Bouches-du-Rhône, voilà comment le capitaine Laurent Rouillon du Service départemental d’incendie et de secours de la Drôme (Sdis 26), chef de colonne lors de cette intervention, analyse les choses. « Parce que dans nos esprits, le feu est un ennemi que l’on doit combattre ! » précise-t-il.
Ces soldats du feu drômois ont été engagés dès les premières heures du sinistre, tôt dimanche matin. « Notre mission consistait à nous rendre sur le flanc Est et à faire du jalonnement pour “rétrécir” le feu. Nous étions huit à évoluer à pied avec des lances et douze autres se trouvaient aux engins » confie le capitaine Rouillon.
Il poursuit : « Le vent s’est levé, a changé de direction. Il a projeté des “sautes” de feu (pommes de pin, gibiers et/ou brindilles en flammes et poussées par le vent, N.D.L.R.). Tout s’est passé très vite. Ceux qui se trouvaient dans les engins ont actionné le dispositif d’auto-protection qui consiste à asperger d’eau le véhicule pour se protéger des flammes. Il a fonctionné entre deux et trois minutes, le temps que le feu “passe” ».
« Notre seule issue : fuir dans le brûlé, dans les cendres »
Le capitaine Rouillon, lui, comme sept autres sapeurs-pompiers, se trouvait à pied, dans l’enfer des flammes. « Notre seule issue a été de fuir dans le brûlé, dans les cendres… Au même moment, un canadair a effectué un largage de sécurité. Ce largage est exécuté très haut afin de ne pas nous assommer et forme une “grosse pluie” ».
« Cela fait 27 ans que je suis sapeur-pompier, livre encore le capitaine Laurent Rouillon. J’ai lutté contre une vingtaine de “gros” feux dans les Bouches-du-Rhône et dans le Vaucluse. Là, à Orgon, j’ai vraiment eu peur. Dans ces conditions-là, on trouve le temps long et on espère que tous ses bonhommes soient saufs. Par chance, j’ai toujours eu une liaison radio. Nous avons tout de même perdu un VLHR, un véhicule de liaison hors route (une voiture 4x4) et nos tuyaux ont brûlé. Mais tout cela n’est pas grave, je suis très satisfait parce qu’avec l’adjudant Éric Martin du groupement Sud du Sdis 26, chef de groupe à Orgon, toutes les procédures ont été respectées. La formation et le respect du commandement ont fait la force de notre groupe ! »
« Pas le temps de me poser des questions »
Engagé dans l’intervention, le caporal Didier Muzeau, sapeur-pompier volontaire au sein du centre de Chabeuil depuis 2002, témoigne : « J’étais également à la tête du feu. Nous avons eu juste le temps de prévenir ceux qui se trouvaient aux véhicules. J’ai eu un sentiment d’impuissance face aux flammes qui nous encerclaient, mais je n’ai pas eu le temps de me poser beaucoup de questions. »
Les questions, elles, ont été partagées quelques heures plus tard. « Lors de notre retour, nous avons échangé entre nous et avec un médecin du Sdis 13 et une psychologue du Sdis 26. Il est nécessaire de dédramatiser, rassurer… », conclut le capitaine Rouillon.
Source : le Dauphine
