
En intégrant tous les facteurs physiques influant sur la dynamique des flammes, la reconstitution numérique d’un incendie ouvre de nouvelles perspectives pour la lutte contre les feux de forêts.
Concentration de traceur de fumée et zone brûlée à 16h30 le 23/07/2009. Vue du panache de l’incendie approximativement à la même heure. CNRS
SITAC. Pouvoir prédire l’évolution d’un incendie est un impératif pour les pompiers qui luttent sur un feu de forêt. Des outils numériques sont déjà utilisés par les services départementaux d’incendie et de secours (SDIS), ils permettent d’établir une SITAC (simulation tactique) sur laquelle apparaissent les zones les plus menacées, les points à défendre (habitations, équipements industriels…) et la position de moyens engagés. Ce document va conditionner l’action de tous les moyens engagés. Ces outils sont encore perfectibles comme en témoigne cette nouvelle reconstitution d’un incendie qui a dévasté la Corse en 2009.
Des flammes à l’atmosphère, premier calcul de la propagation d’un grand incendie
Du 23 au 26 Juillet 2009 plus de 6 000 hectares de forêts sont partis en fumée dans la région d’Aullène, en Corse du Sud. Des chercheurs français ont réussi a simulé avec succès son évolution en combinant les données du simulateur d’incendie ForeFire, mis au point par le laboratoire Sciences pour l'environnement (CNRS/Université de Corse), et le modèle météorologique Meso-NH, développé conjointement par le Laboratoire d'aérologie (CNRS/Université Toulouse 3) et Météo-France.
SUPERCALCULATEURS. Pour réaliser cette simulation, les chercheurs ont utilisé le supercalculateur Jade du Centre informatique national de l’enseignement supérieur (CINES, Montpellier). Ils ont fait fonctionner ses 900 processeurs durant 10 heures pour obtenir le résultat voulu : une simulation qui prend en compte les nombreux phénomènes physiques étroitement couplés qui interviennent dans le développement d’un incendie, des plus petites échelles (moins d’un mètre), aux plus grandes (plusieurs kilomètres). Le tout sur 24 millions de points de grilles.
Un outil pour lutter contre les feux de forêts
Ce modèle permet de prédire, dès les premières heures de l’incendie, la dynamique des flammes, la micro-météorologie au voisinage de l’incendie, la composition et le transport des panaches de fumées à des dizaines de kilomètres ainsi que leur influence sur l’atmosphère. Avec ce nouveau modèle, il serait possible d’estimer les zones de perte de visibilité et de prévenir les sapeurs-pompiers intervenant sur l’incendie, mais aussi d’estimer la qualité de l’air autour de l’incendie afin d’alerter les populations situées sous le vent du feu.
La simulation de l’incendie d’Aullène. CNRS.
VALIDATION. Avant d’être adoptés par les services de secours, les logiciels utilisés doivent encore faire leurs preuves. La simulation d’autres très grands incendies, notamment avec une description plus fine de la chimie atmosphérique, et la confrontation des résultats aux données expérimentales constituent le grand défi de la suite du projet. D’autres scientifiques les ont déjà utilisés pour simuler avec succès la progression de la coulée de lave et du panache de fumée observée lors de l’éruption du Piton de la Fournaise en 2007.
Source : Sciences et Avenir, 14/05/2013