L’INTOXICATION PAR L’OXYDE DE CARBONE

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L’INTOXICATION PAR L’OXYDE DE CARBONE

Nouveau messagede Fireserge33 » 14 Fev 2013, 19:11

L’INTOXICATION PAR L’OXYDE DE CARBONE Conduite à tenir (www.iracle.fr.st)
L’intoxication oxycarbonée est d’autant plus dangereuse qu’elle est souvent ignorée. Elle demeure la première cause de décès par intoxication accidentelle en France. La négligence face à des symptômes mineurs, la méconnaissance des circonstances d’exposition et le polymorphisme du tableau clinique sont les causes principales des fréquentes erreurs diagnostiques.
Comment y remédier, alors que la compréhension physiopathologique de cette intoxication et sa description clinique sont bien connues ? Par un moyen simple : Y PENSER SYSTEMATIQUEMENT, notamment devant la triade classique (mais inconstante), céphalées, asthénie[i] et vomissements, surtout en période hivernale.
1- LES SOURCES D’OXYDE DE CARBONE
Gaz inodore, incolore, non irritant, de même densité que l’air, le monoxyde de carbone (CO) est un polluant de l’environnement, très répandu dans notre société moderne, grande consommatrice d’énergie.
Il n’est pas adsorbé par les charbons actifs constituant les filtres des masques à gaz classiques : il exige l’utilisation de masques spécifiques munis d’une cartouche d’hopcalite, ou encore, d’un « scaphandre » type A.R.I. (appareil respiratoire isolant) des Sapeurs- Pompiers.
A) Les sources domestiques 1°) Les appareils de chauffage (non électriques) défectueux
La principale source domestique de CO est la combustion incomplète d’une substance contenant du carbone (bois, charbon, hydrocarbures...), soit du fait d’un défaut au niveau de l’appareil utilisé (mauvais réglage, conduit d’évacuation insuffisant...), soit par manque d’oxygène (local exiguë, mal ventilé...). L’amélioration de l’isolation des logements et l’utilisation de chauffages d’appoint accroissent le risque d’intoxication accidentelle au CO dans les foyers.
Rappelons que le gaz naturel distribué dans les villes ne renferme pas de monoxyde de carbone et qu’il ne peut donc pas y avoir d’intoxication oxycarbonée par fuite de ce gaz domestique (en revanche, risque d’explosion ! ) ; il en est de même pour le butane et le propane. Mais un appareil au gaz, dont la combustion s’effectue mal, peut produire du CO.
2°) Les fumées d’incendie
Leur composition est complexe, mettant en jeu de nombreux toxiques (cyanure, chlore, phosgène...), mais le CO est le principal. S’y surajoutent aussi la privation d’oxygène, la température des gaz inhalés et les poussières en suspension.
3°) Le tabac Lors de sa combustion, une cigarette dégage 12 à 22 cm3 de CO. B) Les sources industrielles
1°) Les gaz d’échappement des moteurs à explosion (petits garages mal ventilés, parkings souterrains, tunnels en cas d’embouteillage...).
2°) La soudure à l’arc électrique avec électrodes au carbone. 3°) Les sources technologiques (sidérurgie, distillation de la houille...). 4°) Déflagrations d’explosifs.
C) Les sources naturelles
1°) Les gaz des volcans. 2°) Les gaz des marais. 3°) La photodissociation du CO2 en CO, à haute altitude.
2 - RAPPEL PHYSIOPATHOLOGIQUE
La toxicité de l’oxyde de carbone, qui s’exerce en priorité sur le cerveau et le myocarde, s’explique par :
1°) Une hypoxie[ii] due aux modifications du transport de l’oxygène par l’hémoglobine du sang. Elle relève de deux mécanismes :
ß A la fixation préférentielle du CO sur l’hémoglobine entraîne la formation de carboxyhémoglobine (HbCO), responsable d’un blocage fonctionnel de l’hémoglobine, qui n’est plus disponible pour capter l’oxygène ; le taux sanguin de cette carboxyhémoglobine dépend de la durée de l’exposition, de la concentration en CO dans l’air inspiré et du débit ventilatoire
ß A simultanément, à des teneurs élevées en carboxyhémoglobine, l’augmentation de l’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène est responsable d’une diminution du relargage[iii] de cet oxygène dans les tissus périphériques.
2°) Des effets inhibiteurs directs, toxiques, s’exerceraient sur les systèmes enzymatiques d’oxydoréduction cellulaires, tels que les cytochromes oxydases C, cytochrome P 450, peroxydases et catalases.
3 - CLINIQUE
A) LA FORME AIGUË
Les symptômes, très polymorphes et non spécifiques, peuvent être diversement associés :
1°) Signes neurologiques
avec, au premier plan, des céphalées, des signes neurosensoriels, à type de vertiges, bourdonnements d’oreille, troubles visuels, et surtout une asthénie, confinant à l’impotence musculaire, qui peut empêcher le sujet d’aller chercher du secours
Mais aussi :
des troubles de la conscience : perte de connaissance brève ou classique coma agité ou calme, dont la profondeur dépend de la durée de l’exposition et de son intensité ;
de troubles du tonus de différents types (hypertonie extrapyramidale, hypotonie signe de gravité, rigidité de décortication ou de décérébration), mais classiquement sans signe de focalisation.
Peuvent se voir également :
des myoclonies[iv], des crises épileptiques focalisées ou générales, des troubles végétatifs.
2°) Signes digestifs :
Des douleurs abdominales, et surtout des vomissements qui peuvent être au premier plan, mais toujours sans diarrhée (élément différentiel important avec une intoxication alimentaire).
3°) Signes psychiques
Des troubles de l’humeur (angoisse, agitation, euphorie), des troubles du comportement (bouffée délirante ou syndrome confusionnel).
4°) Signes cardiovasculaires :
des manifestations angineuses[v] avec signes d’ischémie[vi] ou de nécrose à l’électrocardiogramme,
une insuffisance cardiaque avec œdème aigu du poumon, dans lequel un élément lésionnel direct n’est pas à exclure, des troubles du rythme ou de la conduction intraventriculaire.
5°) Signes cutanés :
une teinte rouge vif « cochenille » des téguments, classique, mais très peu fréquente, une cyanose ou des phlyctènes aux points d’appui avec phénomène de rhabdomyolyse[vii], en cas de coma.
B) FORME SUBAIGUË OU CHRONIQUE
Parfois professionnelle (indemnisable), elle associe de façon diverse : une asthénie, signe majeur, des céphalées rebelles aux antalgiques habituels, des troubles neurosensoriels (vertiges, bourdonnements d’oreille), un syndrome de type parkinsonien, des troubles de la mémoire, une baisse de l’état général avec anorexie, des phénomènes douloureux diffus, pouvant faire évoquer un état dépressif.
Tous ces symptômes peuvent se dissiper en quelques heures en cas d’éloignement de l’atmosphère toxique, mais ils se répéteront et s’aggraveront tant que l’exposition au CO persistera.
4 - CONDUITE A TENIR
A) L’INTERROGATOIRE Il doit être « policier » à la recherche des conditions de survenues des malaises : - caractère saisonnier ( période de grand froid ou brusque réchauffement de la température) ; - lieux préférentiels (cuisine, salle d’eau, garage...) ;
- caractère collectif, fréquent ;
- les conditions d’installation et de fonctionnement des appareils de chauffage (chauffe-eau, poêle, cheminée, radiateurs mobiles, « salamandre », brasero, barbecue, échappement et/ou chauffage de voiture...) ; leur utilisation intensive ;
- la configuration des lieux (confinement).
B) LES PRELEVEMENTS (si les conditions de l’urgence le permettent) : 1°) Demander aux Sapeurs-Pompiers
- soit de confirmer la présence de CO dans l’atmosphère du lieu supposé de l’intoxication, grâce à un appareil à lecture instantanée muni d’un tube réactif (il n’y a pas de faux positifs) ;
- soit de réaliser des dosages de CO dans l’atmosphère et au niveau des différents appareils en fonctionnement ; dans ce cas, quelques valeurs de référence sont à connaître (ppm = parties par million) :
- au-dessus de 100 ppm =
- à partir de 1.000 ppm =
- àpartirde2.000ppm=
- à partir de 5.000 ppm =
1 volume CO (soit 0,01 %) : taux dangereux ; 10.000 vol.air 1 volume CO (soit 0,1 %) : risque d’intoxication grave ;
1.000 vol. air 1volumeCO(soit0,2%):risquemortelen4ou5h;
500 vol. air 1 volume CO (soit 0,5 %) : mortel en 20 minutes. 200 vol. air
2°) Faire très rapidement un prélèvement sanguin (5 ml de sang veineux hépariné sec) pour
dosage ultérieur de CO.
Les résultats sont exprimés soit en millilitres de monoxyde de carbone pour 100 ml de sang, soit en pourcentage d’hémoglobine transformée en carboxyhémoglobine. Il existe des tables qui permettent de passer d’un résultat à l’autre, en tenant compte du taux sanguin de l’hémoglobine du patient.
Pour un chiffre d’hémoglobine à 14 g pour 100ml, - des troubles peuvent être observés dès 5 ml/100ml ou 25 % de HbCO ;
- ils sont constants à 8 ml/100ml ou 42 % de HbCO ;
- la mort survient lorsque le pourcentage de HbCO dans le sang correspond à 66 % de l’hémoglobine primitivement présente ;
- l’intoxication chronique se définit par la persistance d’un taux d’hémoglobine transformée en HbCO compris entre 5 et 15 %.
Les résultats de ces dosages sont à interpréter en fonction des habitudes tabagiques du malade (les patients fumeurs ont souvent un taux entre 5 et 10 %) et de la précocité du prélèvement. A ce propos, s’il est vrai qu’un trop long délai d’administration d’oxygène fait baisser rapidement le taux de la carboxyhémoglobine, la mise en œuvre des mesures thérapeutiques ne doit, en aucun cas, être différée.
Les taux obtenus ne reflètent donc pas forcément la gravité de l’intoxication, car il s’agit là d’une mesure instantanée qui ne préjuge pas des taux antérieurs. Par ailleurs un taux normal ne permet, en aucun cas, d’éliminer le diagnostic.
C) LES PREMIERS SECOURS La précocité et l’efficacité du traitement conditionnent le pronostic.
1°) Tout sujet présumé intoxiqué au CO doit être immédiatement sorti de la pièce où il se trouve pour être placé dans un endroit bien ventilé, en position de sécurité. Par ailleurs, toutes les personnes qui se trouvent dans le même local que l’intoxiqué sont elles aussi intoxiquées, même si leur symptomatologie est discrète, voire inapparente ; elles doivent donc être soumises au même traitement.
2°) Commencer les gestes de survie : ventilation par bouche à bouche, si la respiration est nulle, irrégulière ou insuffisante ; éventuellement massage cardiaque externe.
3°) Elément essentiel du traitement : mise en œuvre sans délai de l’oxygénothérapie normobare à 100% au masque, à poursuivre au moins six
heures. (N.B. : la mesure transcutanée de la saturation en oxygène n’est pas fiable en présence de carboxyhémoglobine).
4°) Mise en place d’une voie d’abord veineuse.
5°) Dans le cas où le sujet ne reprendrait pas connaissance rapidement, on procèderait à son intubation et à sa mise sous ventilation assistée en oxygène pur, avant de le diriger vers un service de réanimation possédant un caisson hyperbare, sans attendre les résultats de la prise de sang à la recherche de la carboxyhémoglobine.
D) L’OXYGENOTHERAPIE HYPERBARE
Elle induit une diminution plus rapide du taux de carboxyhémoglobine que l’oxygénothérapie normobare.
1°) Ses indications théoriques (tenir compte évidemment des contraintes locales) :
- toute intoxication au monoxyde de carbone, avec signes cliniques ou ayant présenté une perte de connaissance, même brève ;
- quand il s’agit de femmes enceintes ou d’enfants. N.B. : le taux de la carboxyhémoglobine n’est, ici, pas déterminant.
2°) Ses contre-indications - l’œdème aigu du poumon,
- un collapsus, - l’encombrement respiratoire, - des troubles du rythme cardiaque.
3°) Ses modalités - elle doit être entreprise avant la 6ème heure qui suit la découverte du patient ;
- on peut, si besoin, procéder à plusieurs séances avec plateau de 3⁄4 d’heure à 1 heure, à la pression de 2 à 3 atmosphères, à quelques heures d’intervalle ;
- l’administration préventive de Valium évitera les convulsions dues à l’hyperoxygénothérapie.
4°) Son mode d’action Il est triple :
- elle corrige l’anoxie tissulaire en augmentant l’oxygène dissous ; - elle favorise l’utilisation de l’oxygène au niveau des tissus hypoxiques ;
- elle augmente la vitesse de dissociation de la carboxyhémoglobine et de la carboxymyoglobine.
E) SURVEILLANCE ULTERIEURE
Par la suite, l’intoxiqué devra faire l’objet d’une surveillance médicale attentive, car un « syndrome secondaire » peut survenir, même après des intoxications d’apparence tout à fait bénigne, au terme d’un intervalle libre de quelques jours à plusieurs semaines.
1°) Complications cardiaques : insuffisance coronarienne de tous types, qui justifient des contrôles électrocardiographiques réguliers.
2°) Manifestations neuropsychiques dont les plus graves peuvent aboutir à une détérioration majeure et parfois irréversible des fonctions supérieures.
Ainsi, l’intoxication oxycarbonée reste insidieuse et potentiellement grave. Seul un diagnostic précoce permet la mise en route rapide de l’oxygénothérapie et réduit le risque de séquelles parfois redoutables.
B.R.
[i] Etat de faiblesse. [ii] Diminution de la quantité d’oxygène distribuée aux différents tissus par le sang. [iii] Restitution. [iv] Contractions musculaires cloniques, brusques, involontaires, non systématisées, se répétant à des intervalles variables. [v] Crises de douleurs constrictives violentes, siégeant dans la région thoracique gauche et irradiant dans le bras du même côté. [vi] Insuffisance de la circulation du sang dans les vaisseaux coronariens. [vii] Destruction du muscle strié.
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